lundi 15 janvier 2007

The division of love's labour - Dimanche 14 janvier 2007

Lou Schibronsky a trois amants en 1985: LO et TvT (toute l'année), et Max Schibronsky (plus tard, à partir de septembre).

Avant sa rencontre avec Max, elle partage ses passions entre son "amant de plume" et son "amant de peau". Tous les deux sont d'assez petite taille et ont les cheveux noirs, mais là s'arrêtent leurs ressemblances.

Avec le premier, elle échange des lettres, s'embarque dans des conversations d'humanistes cultivées (ils ont tous les deux fait leurs gréco-latines), développe son goût pour la musique (musique classique que LO lui fait découvrir et musique pop qu'elle fait découvrir à LO), le cinéma d'auteur (I. Bergman, W. Allen, R. Altman, D. Lynch, etc.) , le théâtre ( ils ont vu ensemble "L'éveil du printemps" de Wedekind, par exemple), et s'adonne à leur passion commune pour l'étrange culture du Japon (à travers Y. Mishima, car LO est gay, mais aussi toute la littérature qui précède celui-ci). LO y est allé lui, au Japon. Il a déjà fait un "tour du monde" en voyage organisé, d'ailleurs. Lou, elle fait du karaté. Elle lit les maîtres Zen aussi.

Avec le second, "l'amant de peau", choisi par Lou dans le cadre de la fascination commune de LO et Lou pour les asiatiques, Lou explore sa sexualité, la cuisine orientale, et une toute petite partie de la culture chino-vietnamienne.
TvT est en effet un étudiant en médecine vietnamien issu d'une famille bourgeoise de réfugiés politiques. Des réfugiés privilégiés, les "plane people", pas un des infortunés "boat people" que l'on connait des actualités des années '7O. Madame Le Thi avait de bonnes connections, son mari était un officier de l'armée sud-vietnamienne.

- "Pourquoi faire simple, quand on peut faire compliqué?", direz-vous.

Pourtant, il y a une certaine folie de l'intimité, liée à note époque, où l'on veut qu'un seul être soit à la fois le meilleur ami, le meilleur amant et le meilleur mari. Fidèle comme un ami, passionné comme un amant et solide comme un mari.

Et si la personne accablée de tous ces rôles et de toutes ces tâches hétéroclites n'a pas toutes les qualités et compétences nécessaires pour remplir les premiers ou mener à bien les secondes? Est-ce bien raisonnable d'en demander tant d'une seule personne?

Il fut un temps où les femmes n'avaient d'intimité avec leur mari que celle de la procréation (et encore, je veux dire celle de la conception, pas celle de la grossesse et de la naissance) et avec leurs meilleures amies, elles partageaient les confidences et les émois que leur inspirait la vie, tandis que les plus fortunées d'entre elles exploraient leur sexualité avec l'amant ou l'amante de leur choix, si elles avaient la chance de rencontrer un jour une véritable passion amoureuse, mais ça n'arrive pas à tous le monde, comme on sait.

Ceci dit, n'y a-t-il pas bel et bien quelque chose de malsain dans la division des passions de Lou Schibronsky entre LO et TvT ?
Quelque chose que TvT ne peut pas vraiment digérer, lui qui est venu le deuxième et qui n'arrive pas - il n'en aurait certainement pas le temps : il étudie la médecine - à rivaliser sur le plan culturel avec LO qui étudie la mise en scène et le cinéma.

Lou Schibronsky ne se rend pas compte que cette situation est injuste envers son amant de peau. Elle croit que la douce intimité qu'elle vit avec LO s'appelle "amitié" et que le désir qu'elle éprouve pour le corps de TvT s'appelle "amour".

Là, il y a des confusions et des glissements de sens, tant qu'on veut.
De quoi délecter un analyste (du language, de la psyché, ou des comportements,...).

- Et vous, ça vous inspire quoi, cette situation?

Et comment vont s'équilibrer les forces de ce champs magnétique, quand Max Schibronsky, le troisième homme, celui qui aurait pu être "le mari" de Lou, va faire son apparition sur scène? Ça nous ne pouvons pas le savoir, sans faire un "flash forward" vers l'automne de 1985.

Max Schibronsky ist überall !

Max est allemand, il vit à Hambourg, il étudie la géographie, travaille chez un éditeur de littérature pour enfant. C'est un grand blond et frisé. (Ben oui, les frisés quoi!)
Max est passionné par l'Italie, il parle très bien français. Il va rencontrer Lou dans l'auberge de jeunesse, pendant ses vacances à Firenze (Florence, Italie.) Ils vont s'écrire des lettres, devenir intimes, s'aimer entre les draps de nombreux lits aussi, et ... que va-t-il se passer?
Pas un "happy end" holliwoodien, rassurez-vous.
Oooh, non!

A la radio: "Putain, putain, c'est vachement bien,
nous sommes quand même tous des Européens !",
chante Arno de T.C. Matic.

1 commentaire:

Dialogism a dit…

Dans son roman "Puff Ball", Fay Weldon parle de la même division du travail en amour/sexualité et cette fois du point de vue masculin. Voici le passage en question, dans sa version originale :

"There were, Richard thought, three kinds of women, and three kinds of associated sex. Liffey's kind, which went with marriage, which was respectful and everyday, and allowed both partners to discuss such things as mortgages and shopping on waking.

Bella's kind, which went with extra-marital sex, and self-dsigust, and was anal and oral and infantile, and addictive, and so out of character that nobody said anything on wakiing if only because the daily self and the nightly self were so divorced.

Miss Martin's kind, which involved seduction : the pleasure of inflicting and receiving emotional pain : in which the sexual act was the culmination not to physical forplay - for orgasm was in no way its object - but of long, long hours, daus, weeks, of emotional manipulation.

It woould not be possible, nor indeed desirable, Richard thought, to find these three different women in one body ; he could never satify his needs monogamously. Could any man?"

Les trois femmes de Richard correspondent respectivement aux trois hommes de Lou Schibronsky : Max Schibronsky, le mari, l'autre de la relation respectueuse; TvT, l'amant, son partenaire pour l'exploration sexuelle, et , LO, l'ami, l'expert de la manipulation émotionnelle mutuelle.

Lou Shibronsky n'a jamais lu ni entendu parler de Fay Weldon, soit dit en passant, même pas en traduction française.