dimanche 7 janvier 2007

Diario Freddo - Lundi 7 janvier 1985

Hier, avec mon filleul Sébastien qui a six ans, nous avons eu l'occasion de jouer un jeu de table, en famille . Il apprend à jouer aux jeux de société et comme il et le plus jeune, il perd souvent. Bien sûr, il n'est pas content, il pleure, parfois il se fâche. Il refuse de jouer une revanche. J'essaye de lui parler, de lui expliquer qu'on peut perdre aussi au jeu de façon honorable quand on a fait de son mieux pour bien jouer. Et qu'on peut quand même s'amuser à jouer tous ensemble, trouver du plaisir dans le jeu plutôt que dans sa conclusion. Que c'est même plus gai, si c'est pas toujours les mêmes qui gagnent, s'il y a un peu d'alternance. Ça donne envie de rejouer, de tenter sa chance encore une fois. D'essayer de prendre sa revanche, car plus on joue plus on apprend, plus on devient meilleur à ce jeu.

Comme je le comprends, comme je ressens ses colères, sa honte, à nouveau. Évidemment, comme chaque fois qu'on joue à des jeux en famille, ma mère me ressert la vieille histoire de famille : "Moi, j'en connais une qui étais une très mauvaise perdante. Et qu'est-ce qu'elle se fâchait, quelles scènes de colères elle nous faisait!"
Et elle s'en moque encore, et elle fait la fière. "Finalement, pour avoir la paix, combien de fois est-ce qu'on ne t'a pas laissé gagner !" Qu'est ce qu'on était bons avec toi.

Et là, cette fois-ci, j'ai explosé. C'en était une fois de trop.
- "Vous n'avez jamais compris que si j'étais mauvaise perdante, comme tous les enfants, vous, vous étiez d'autant plus de mauvais gagnants? J'étais la plus jeune de la famille après tout. Pourquoi vous moquiez-vous des perdants au jeu?"

- "Et puis, vous disiez toujours : "Ce n'est qu'un jeu, après tout" ou des platitudes de ce genre.
Pour un enfant, jouer, c'est du sérieux. Jouer, c'est apprendre à vivre.
Et vous vouliez en même temps que je devienne une gagnante dans la vie?
Ou une bonne perdante comme vous, peut-être?"

- "Et maintenant, vous allez faire la même chose avec Sébastien?
Vous lui faites honte de perdre, en même temps que vous lui demandez d'être gagnant, et ensuite vous essayez de lui faite croire que tout ça n'a pas d'importance, et que ses sentiments et ses émotions sont déplacées. Qu'est-ce que c'est que cette comédie insensée?"

- "Et aujourd'hui, vous me dites que vous me laissiez souvent gagner?
Ah, bravo! Ça , c'est le sommet de l'art de l'éducation ! "

Comment mieux faire pour donner à un enfant un faux sens de la confiance en soi?
Et vous croyiez peut-être que j'en était dupe à chaque fois?
Quel meilleur moyen pouvez-vous imaginer de donner à un enfant l'illusion que, dans la vie aussi, les autres se doivent de lui faire une fleur, à la moindre difficulté, qu'il est normal de lui donner des passes-droits, ou de piper les dés en sa faveur?

Vous en avez d'autres comme ça? Des techniques pour lui faire croire qu'il ne pourra gagner qu'un trichant, avec la complicité de tous, de surcroît.
Vous vous spécialisiez dans la formation de petits imposteurs?
Tout ça, juste pour avoir la paix. Pour ne pas devoir subir mes colères d'enfants.

Mon frère m'a avoué qu'un jour vous avez emmené mon chat à la campagne, pendant que j'étais à un camps scout. A mon retour, vous avez prétendu que le chat était parti, s'était perdu dans les bois. Vous l'avez appelé avec moi, au fond du jardin. Vous avez même fait la tournée des voisins avec moi pour demander s'ils avaient vu Cléo.

Comment pouvez-vous mentir à un enfant, plutôt que de prendre le temps de lui expliquer pourquoi vous ne désirez plus avoir un chat à la maison, pourquoi cela avait été une erreur de l'adopter en premier lieu?
Être malhonnête avec vos proches, et prétendre à leur donner une éducation morale, vous trouvez ça logique?

J'ai longtemps regretté la perte de mon petit chat, j'ai même pensé que c'était de ma faute, parce que j'étais partie au camp et que j'aurais du rester m'en occuper mieux.

J'en ai été triste , jusqu'au jour, des années plus tard, où j'ai appris la supercherie. Alors j'étais en colère pour le chagrin d'enfant que vous m'avez causé inutilement. Et je me demandais quel genre de gens vous étiez, pour avoir ainsi peur d'affronter mes colères d'enfant, mes refus et mes rébellions, au point de préférer plutôt de me mentir et de tricher.

Vous auriez pu me persuader de confier Cléo au fermier, où j'aurais pu aller lui rendre visite de temps en temps et le voir devenir un vrai chasseur de souris et avoir une belle vie de chat.

Pour en revenir aux jeux, vous avez réussi à transformer une mauvaise perdante en mauvaise joueuse. Je vous en félicite : quel chef d'oeuvre!

Je suis devenue celle qui se place d'emblée hors jeu. Paralysée par la peur de perdre et par la honte à la possibilité même de ne pas gagner, vous avez fait de moi quelqu'un qui hésite à être un véritable protagoniste dans les jeux sérieux de notre société.

Quelqu'un qui se met toujours dans la position de l'ethnologue, de l'observateur extérieur. Quelqu'un qui rêve sa vie, au lieu de la prendre à bras le corps.
Quelqu'un qui se réfugie dans les coulisses et dans les antichambres et n'ose pas prendre le risque de monter en scène.
Quelqu'un qui s'efface et laisse passer les autres, là où une place sur mesure l'attendait, si seulement elle était prête à se battre pour l'obtenir.
Quelqu'un qui se répète: "C'est perdu d'avance."
"Mieux vaut se retirer hors du jeu, que de risquer de rencontrer la honte à nouveau."

Bravo, je vous remercie pour cette leçon de vie!

(....)

Finalement, je ne vous ai pas écouté. Je le comprends à la façon dont j'ai envie de parler à Sébastien. De lui dire qu'il a raison d'être en colère. Qu'il faut du courage pour apprendre à jouer. Qu'en persévérant, on y trouve du plaisir.
Heureusement, j'ai reçu des encouragements ailleurs.
Finalement, l'appétit de vivre en moi à quant même repris le dessus.
Mais pas grâce à vous.

Vous, vous disiez à qui voulait l'entendre, et vous le dites encore devant un enfant de six ans, que j'avais mauvais caractère. Que j'étais colérique. Quand on me mentait, on me trompait, on ne tenait pas compte de mes besoins! Vous trouviez mes rebellions, vis à vis du sentiment de ne pas être respectée, très déplacées, et mes émotions violentes, irrecevables. Comment d'autre vous attendiez-vous à ce que je réponde à vos petites violences? Par la soumission? Par la flatterie?

Qu'est ce qu'on a du vous faire, à vous, pour vous couper les ailes, et pour vous rendre aussi mesquine? Qu'ont-ils fait de votre générosité? De votre grandeur d'âme? De votre noblesse?
Combien d'humiliations ont-elles été nécessaires pour vous rendre aussi "bête", bestiale?
Être la reine des poules dans la hiérarchie des coups de becs. C'est tout ce qui vous restait?

1 commentaire:

Valentina a dit…

"Nobody is perfect!" Mi viene da dire: Nessuno è perfetto! A volte una bugia detta a fin di bene, può causare psico-traumi a un bambino..ma fino a un certo punto..Fa parte del gioco delle parti (parents) cercare di preservare la specie . Se dovessi elencare la quantità di bugie dette a me quando ero piccola, e ai "traumi" che possono avermi procurato, a quest'ora sarei rinchiusa in un ospedale psichiatrico..Bisogna dare il giusto peso alle cose..senza elevare alla massima potenza anche le piccolezze e le scelte che i genitori (parents) fanno durante la crescita dei propri figli. Credo che "Nessuno nasce imparato" dice una battuta di Totò, grande artista del cinema italiano...perciò?!