jeudi 27 décembre 2007

Diario Freddo - Mardi 3 septembre 1985

Journal de Ludwig Grüne, par Lou Schibronsky
J'ai passé pour la première fois toute une nuit avec Hannah. Quelle douleur! Je me suis endormi facilement - si je peux dire endormi - je me suis saoulé au vin blanc. L'alcool me rend moins sensible. Le réveil au petit matin fut plus dur!

Je ne peux écarter de mon esprit le désir qui m'assaille. Avec elle désir et inhibition du désir : un impératif de respect. Mais j'ai horreur de ces lits où il ne se passe rien. Elle le sait. elle n'aime que les câlins romantiques et l'amour purement cérébral. Mon corps se met à trembler. Je cache mon visage sous ses oreillers de satin bleu pour qu'elle ne voit pas mes pensées lascives. Je me demande si je vais craquer. Lui imposer mon désir. La prendre de force. Et je déborde de tristesse à cause de ces limites que nous ne pourrons pas franchir. Je ne trouve pas de mots. Si j'étais capable de mieux me contrôler, nous pourrions même être plus intimes, mais il me faut tout ou rien. Sa tête sur mon épaule ou la chaleur de son corps contre mon dos. Excuse-moi, mais c'est déjà trop.

Hannah se lève et s'enfuit dans la salle de bain. Elle dis qu'elle n'a jamais si bien dormi.
Dormir! Je n'ai pas à subir la honte d'un refus, le genre de chose qui me met la mort dans l'âme, puisque je ne te demandes rien. Mais ce refus s'est posé depuis toujours, dès le départ, entre nous. Il me reste quand même des doutes. Est-ce que vraiment nous ne serons jamais amants? La frustration vaut-elle mieux qu'une mutuelle déception?

Comprends moi, Hannah, je suis un homme qui aime les femmes et quels que soient tes goûts et tes choix en matière de sexualité, tu restes une femme, pour moi. Quand j'aime une femme, je la désire comme un homme désire une femme. Je voudrais te faire tout ce qu'il est physiquement possible de faire. Et que tu me donnes en échange toutes les caresses que tu réserves aux amantes dont tu rêves.

Oui, moi je rêve encore de cette nuit de noce mythique : blanche jusqu'à la transparence.
Notre nuit, cette nuit n'a pas été blanche et tu n'oses croiser mon regard lourd de désir et triste d'une chasteté tout ce qu'il y a de plus forcée. Une interdiction stricte que je m'impose dans la douleur. Puisque tu sais bien que je ne peux pas me permettre de mi-chemin.
Je n'aurais jamais du rester dormir chez toi.....

La solitude pourtant, l'isolement sont encore plus insupportables. c'est pourquoi je ne peux que souffrir la douleur de dormir dans tes draps, dans les bras d'un être tel que toi.

"Le besoin est humain", consens-tu à me dire. Je ne peux même pas plaider le besoin.
Une petite amie, j'en ai déjà une. Je ne peux plaider que ma nature ardente, totale, insatiable.

De part le respect que je te porte, ce n'est qu'avec toi que je peux comprendre ce que veulent dire les mots culpabilité et pêché, en matière de sexe. Et juste pour une seule fois, la première et la dernière fois, me reprocher d'être né homme et de ne pouvoir même pas, par quel subterfuge, par quel filtre magique, te donner l'illusion que je suis une femme. Juste pour un soir.

Rêverai-je encore de cette nuit mythique? Quelque part, je dois te détester. Être en colère contre toi. S'il pouvait au moins y avoir entre nous la jouissance de la violence. Il doit y avoir un roman pour les sentiments qui nous lient.

Je ne peux pas vivre sans toi. Console-moi d'être avec toi, sans pourvoir te faire mienne. Blessures dans la recherche d'un mit-sein taillé à notre démesure.


Ludwig Grüne

Diario Freddo - Lundi 2 septembre 1985

Trouver un ton et un style qui soit propre à mon mode d'expression.
Tendance à écrire au coup par coup. Courtes nouvelles. La longueur maximum correspond à celle que je peux atteindre en un seul jour, en une après-midi. je ne peux écrire que d'un seul souffle. comment tenir ce rythme syncopé dans un ouvrage de longue haleine sans qu'il soit décousu?
Peut-être en lui donnant une structure arborescente et en accrochant chaque jour une feuille à ses branches?
Décousu - recousu - même un patchwork peut former un dessin, un ensemble harmonieux, un tout ayant son existence propre. Le principe du puzzle?

Diario Freddo - Dimanche 31 août 1985

Notes de lecture :
Le fusil de chasse de Inoue
comme une estampe japonaise en miniature.

La confession impudique de Tanizaki
Il faut que je l'achète, c'est un must have.


+ trouver une photo du réalisateur de Dim Sum
un américain d'origine chinoise qui s'appelle Wayne Wang.

autre film :
Je suis allée voir avec Lo et Carmen Another country
de qui encore? avec Rupert Evret dans le rôle principal.
Je suis restée loger chez Lo dans le petit appart où il avait fait sa tentative de suicide.
Grandes fenêtres sans rideau. Le clair de ville dans la chambre toute la nuit.
Lo a bien dormi et moi j'ai veillé. Je l'ai regardé, écouté et senti dormir et rêver de Rupert Evret.
Et moi, Lou Schibronsky, j'ai tansformé ma frustration en fiction.

mardi 21 août 2007

Diario Freddo - Mercredi 28 Août 1985

Lo a écrit une lettre au Professeur D.
Elle est "drôlement bien chiée".
Et dire que Lo en a mis à la poste une photocopie!



Monsieur le Professeur,
Comme vous le savez déjà, nous nourrissons le projet d'écrire et de réaliser un moyen métrage de fiction dont la trame narrative est inspirée d'un fait divers authentique. La scénarisation épouse le cheminement psychologique d'une femme jalouse et meurtrière, mais à des fins démonstratives et littéraires, nous avons pensé que l'histoire serait présentée en boucle, mêlant à l'intérieur de l'intrigue le passé éloigné et le présent immédiat.

Si notre entreprise vous intéresse toujours un tant soit peu, nous vous serions reconnaissants de nous aider à recréer des personnages qui soient plus que de simples attitudes morales. Pour qu'ils soient aussi de chair et de sang, nous ne pouvons compter que sur notre mince expérience. Afin de pouvoir l'exploiter au mieux, vous nous serez certainement d'une précieuse aide.

Dans l'espoir d'une rencontre prochaine, nous croyons déjà pouvoir vous remercier et vous prions, Monsieur le professeur d'agréer l'assurance de nos sentiments respectueux.

LO et Lou.

Diario Freddo - Dimanche 18 août 1985

Alors que l'horloge sonnait ses vingt-cinq août...

Adrénaline: "J'espère que mes questions n'errerons pas dans les limbes."

Lou : "Mes deux grands yeux feuilles mortes...."

L'humour d'Adrénaline :

"Ou bien nous mourrons fous , ou bien nous deviendrons des écrivains japonais célèbres....."


Lecture :

Jack Kerouac, Tristessa.
Inoue, Le fusil de chasse.
Tanisaki, La confession impudique.

Diario Freddo - Mardi 30 juillet 1985

Elle dort.
Il la regarde.
Elle a l'air calme, insouciante, le visage détendu.
Elle ouvre les yeux.
"Tu me regardais dormir !"
- "Je voudrais prendre une photo de toi, nue, ici."
Elle : "Ooh, non..."
Ils déjeunent: " Je dois partir. Foutu rendez-vous chez le dentiste..."



"Si le baiser n'était pas la chose la plus importante de la vie, la genèse ne commencerait pas par là"

C. Pavese, Le métier de vivre, 1958.



Lecture :

Jack Kerouac, Maggie Cassidy.

"Comme elles n'étaient pas sûres d'elles, elles attendaient que les autres leur renvoient la certitude d'une existence véritable."

A mon avis, le meilleur de ses romans.

Diario Freddo - Lundi 22 juillet 1985

J'ai reçu une lettre étrange de Pascal N.. Je la lis comme un encouragement, une incitation à l'écriture. Du moins , c'est l'effet que cette lettre à eu sur moi.
Je montre cette lettre à ma mère e t à mon frère. La dernière phrase surtout. Elle pourrait être écrite par Lo : "La précision dont tu fais preuve ne manqueras pas de te garder quelques étoiles pour le matin."

J'essaie d'écrire une meilleure version de "La rencontre insolite...". Mais il semble que lorsque j'essaie d'écrire de choses personnelles, en puisant dans mes souvenirs, ou bien des choses imagées, comme mes visions de Norvège, je devienne mièvre.

Je lutte surtout contre cette écriture mièvre.

Mieux vaut encore ne pas essayer d'être sincère... Utiliser l'écriture comme un masque : il en transparaîtra toujours quelque chose ! Le masque qui dévoile, le voile qui démasque !

mercredi 11 juillet 2007

Quote of the day

Un envoi d'Adrien Antoniol.

"Speech is conveniently located midway between thought and action,
where it often substitutes for both."
John Andrew Holmes

Le goût des mots

"Les mots nous intimident. ils sont là, mais semblent dépasser nos pensées, nos émotions, nos sensations. Souvent, nous disons : "Je ne trouve pas les mots." Pourtant, les mots ne seraient rien sans nous. ils sont déçus de rencontrer notre respect, quand ils voudraient notre amitié. Pour les apprivoiser, il faut les soupeser, les regarder, apprendre leurs histoires, et puis jouer avec eux, sourire avec eux. les approcher pour mieux les savourer, les saluer, et toujours un peu en retrait se dire je l'ai sur le bout de la langue - le goût du mot qui ne manque déjà plus. "
Philippe Delerm

Diario Freddo - Dimanche 7 juillet 1985

Les films que j'ai vus cette semaine :

Birdy d'Alan Parker, avec Sylvain.

China Blue, Crime of Passion, de Ken Russell, avec LO.

Wittness, de H. Ford, avec TvT.

lundi 2 juillet 2007

Dialogism

Vivez votre rêve au lieu de rêver votre vie !

Tous les sportifs de haut niveau se font accompagner par un coach. La vie, c’est aussi un sport de haut niveau. Elle nous demande de réaliser un numéro d’équilibriste entre nos réalisations professionnelles, nos projets privés et notre développement personnel. Et quelle différence ça fait de recevoir des encouragements au bon moment! Votre coach personnel vous accompagne, vous soutient et vous motive à définir clairement et à trouver où se situe aujourd’hui, pour vous, ce point d’équilibre.

Or tout au long des différentes phases de notre vie, ce point d'équilibre se déplace. Tout bouge, tout évolue, tout se transforme. Souvent les solutions d’hier ne marchent plus aujourd’hui. Votre coach vous aide à embrasser le changement et à l’intégrer à votre dynamique de vie. Parce qu’il faut faire preuve de créativité pour se réinventer perpétuellement, avec les ressources du coaching, vous ne tournez jamais en rond dans vos réflexions. Du dialogue avec un expert en la matière naissent de nouvelles idées, des points de vues jusqu’alors inexplorés. Votre vision s’élargit, les murs tombent de vos oreilles, la vie prend des saveurs dont vous n’aviez pas encore fait l’expérience.

Grâce aux techniques de coaching, vous découvrez en vous des possibilités auxquelles vous ne vous attendiez plus. Quand vos pensées, vos actions et vos valeurs s’ajustent sur la même longueur d’onde, vous vous surprenez par les trésors d’énergie et de motivation qui se libèrent et se révèlent à vous. Vous vous sentez prêts à déplacer des montagnes. C’est le moment de transformer vos rêves en projets et de les réaliser.

Qui sommes-nous ? Que faisons-nous ?

Dialogism est un service de coaching créé par Lucie Antoniol, docteur en philosophie de l’université de Stirling, en Ecosse. Lucie Antoniol s’est formée aux techniques de coaching chez « Coaching Ways », à Bruxelles.

Comme Socrate, le philosophe de l’antiquité, un coach socratique vous pose des questions : les bonnes questions, celles qui vous provoquent, qui vous défient et qui vous aident à accoucher de vos idées.

Un cycle de trois séances d’une heure vous permettra déjà de cerner votre premier objectif et de débloquer l’énergie nécessaire à sa réalisation.


Voulez-vous en savoir plus sur nos services ?

Contactez-nous.

Dialogism : Coaching socratique

Tél : 084 45 77 53

Gsm : 0495 406994

Adresse : rue de la gare 9

à 6960 Dochamps

(entre La Baraque de Fraiture et La Roche en Ardennes)

E-mail : lucie.antoniol@gmail.com
www.dialogism.org
http://dialogism-diario-freddo.blogspot.com

Le coup d'oeil du coach

"Thoughts are real", he said. " " Words are real. Everything human is real, and sometimes we know things before they happen, even if we aren't aware of it. We live in the present, but the future is inside us at every moment. Maybe that's what writing is all about, Sid. Not recording events from the past, but making things happen in the future. "

"Oracle Night", Paul Auster


L'idée de nos expériences passées conditionnent notre avenir, en déterminant nos comportements dans le présent et dans le futur, est une idée bien connue, familière depuis que la psychologie s'est popularisée. Moins connu est le fait que notre avenir (tel que nous l'envisageons) est aussi déterminant pour notre présent. Tandis que ce sur quoi nous concentrons notre attention dans le présent détermine notre avenir.

"Il n'y a de futur que dans le présent", dit K-Pax le héros d'un film troublant sur le parcours d'éveil d'un psychiatre.
Plantons dès aujourd'hui les semences d'un avenir tel que nous le souhaitons.
Mettons en place et nourrissons les habitudes dont nous aurons besoin pour soutenir nos efforts.
Arrachons comme des herbes folles les mauvaises habitudes qui nous empêchent de progresser vers la réalisation de nos projets les plus chers.
Il n'y a plus une minute à attendre, car chaque matin est le premier matin: le premier jour du reste de notre vie. Et il est aussi bon qu'un autre pour faire le premier pas vers la réalisation de notre potentiel.

mardi 19 juin 2007

Diario Freddo - Mardi 25 juin 1985

Lettre à TvT :


Tu étudies le corps de l'homme
Moi, j'étudie sa pensée
Idée de complémentarité?
Quand tu as froid, j'ai chaud
Quand j'ai froid tu es là pour me réchauffer
Nous sommes un peu comme le corps et l'âme
Tantôt l'un , tantôt l'autre
Échangeant les rôles
Puisque nous ne sommes jamais un seul être mais deux
Et qu'il vaut mieux être deux
Pour faire des merveilles
Entre deux corps et deux âmes.

Ne pas être seul, c'est recevoir des souhaits de bonne fin de session
dans son courrier personnel.

With all my love,

Lou

Diario Freddo - Vendredi 21 juin 1985

Qui a écrit ceci ?


"Il y en a qui sont morts d'avoir accouché d'agneaux et non de loups."

"Il ne faut pas se fier aux coeurs nobles, ils sont trop changeants."


Auteurs?

****

Interviews à la sortie d'un film :

Vous avez aimé XYZ?
- Oui!
Pourquoi?
- J'ai aimé à me taire, pas à en parler.

Le style ruminant : c'est se faire violence que de parler d'un film, alors qu'on sort à peine du ciné. Sauf pour évoquer des scènes, les revoir.

Diario Freddo - Mercredi 19 juin 1985

Il ne faut jamais prendre de décisions la nuit.
Les choses de la nuits sont trop graves.
La nuits tous les chats sont gris.
La nuit on ne voit que du noir

Il Buio



La mauvaise conscience du chercheur qui prend un autre homme pour objet d'étude et non pas pour un autre être humain.

Proverbe :
A rudes semaines, joyeuses fêtes.

Version étudiante:
Après les examens, la guindaille.

Diario Freddo - Mardi 18 juin 1985

Conseil aux insomniaques :

Faites une sieste tous le soirs avant de vous coucher.

Extrait de "Comment dormir en 12 leçons" de Sylvain Maes


Film à voir:
Man of Flowers de Cox ( Australie, 1983)

Diario Freddo - Lundi 17 juin 1985

Fini Pa Kin Famille

viduité : état d'être veuve

Un jeune femme est amenée à épouser la tablette de son fiancé défunt :

"Elle accepta de plein gré d'observer la viduité après la mort de son fiancé,
en songeant qu'on allait lui édifier une arche de chasteté."

Diario Freddo - Vendredi 14 juin 1985

Film à voir:

La rose pourpre du Caire
Purple rose of Cairo
de Woody Allen

Diario Freddo - Jeudi 13 juin 1985

I have bought two rosebuds and one iris :
I hope it will bring me luck for tomorrow.


Commencé à lire Famille de Pa Kin

Diario Freddo - Samedi 8 juin 1985

Un samedi distingué
à marquer d'une pierre blanche

chasse poussière
dust
memories

Fièvre jaune
Mékong
Où je m'en vais satisfaire ma nature ardente
... dont je ne fais pas étalage.

Ao Dai

Diario Freddo - Vendredi 7 juin 1985

Les yeux de la forêt


"Nous ne sommes pas en mesure de savoir combien de dimensions a "l'espace en soi".
La paramécie vit sur a conception d'un espace pour ainsi dire unidimensionnel. Nous pourrions comme ma paramécie manquer les autres dimensions."

Auteur?

Diario Freddo - Jeudi 6 juin 1985

Comme les gens deviennent doux après avoir craché tout leur venin.

Valéry le dit bien mieux.


Je lis les Aphorismes de Georg Christoph Lichtenber

Diario Freddo - Lundi 13 juin 1985

"Nos dissensions s'évanouissent et nous nous réveillons des images monstrueuses qui nous représentent les uns aux autres."
Paul Valéry


C'était encore la pleine lune.

L'ange en décomposition m'entrainera-t-il dans sa chute?
Il faut voir jusqu'à quel point l'amour de moi supportera l'amour de l'autre - de lui.

mercredi 30 mai 2007

Diario Freddo - Vendredi 31 mai 1985

Il a téléphoné deux fois pendant que je me reposais au creux de ton épaule.
Il ne m'a pas trouvée.
Il a râlé. il a dit que si je t'aimais tant, je n'avais qu'à t'épouser (bonne idée!)
Il a souhaité ta mort.
Pas la tienne en particulier. Il a fait sa déclaration de haine au monde entier.

La vie est un conte de fées. avec ses sorcières , ces ogres et ses monstres. Nous essayons de gagner des points - petit poucet ou petit chaperon rouge - pour n'être pas à l'heure du dénouement dévorés par le grand méchant loup.

Ne meurs jamais, Lo.
Ne me laisse pas seule dans ce monde là.
Je t"embrasse. Là.

Lou

Diario Freddo - Mardi 29 mai 1985

Moi - Autrui


"Le solipsiste prétend-il aussi qu'il est le seul à savoir jouer aux échecs?"

Ludwig Wittgenstein


Quel pouvait bien être le programme politique du cercle de Vienne?
Voilà pourquoi je redoute une lecture exclusivement positiviste du Tractatus. c'est probablement une lecture possible, mais peut-être passe-t-elle à côté de l'essentiel : ce qui ne peut être dit.

Si ce dont on ne peut parler n'existait pas, la bonne méthode en philosophie serait....

Une philosophie à la mesure de la théorie de la relativité?

Assymétrie
Symétrie

Diario Freddo - Lundi 27 mai 1985

LO dear,

Il me tarde d'entendre de vos nouvelles.
Si je vous imagine à mon image, vous devez être effervescent.
Quelque bulle parviendra bien à mon oreille pour faire écho de vos derniers éclats?
J'ai contemplé les cerisiers en fleur et j'ai cueilli le muguet. Je rêve toutes les nuits.
Je ferme l'Ugetsu Monogatari et je m'endors.
Les Bouddhas viennent me parler en songe.

"Que sont mes amis devenus
Que j'avais de si près tenus
Et tant aimés?"


Il me tarde de revoir vos visages de lune , même si je viens à peine de franchir le portail de votre demeure.
Le myosotis fleurissent-ils toujours dans votre jardin?
Non ti scordar di me.
Nous verrons-nous seulement aux chrysanthèmes?
Je suis en impatience de tout , de tous et de toutes.
Que tout soit fini pour que tout recommence.
Que l'argent à peine gagné soit aussitôt dépensé.
Que nos biens passent de main en main.

Lou

mardi 29 mai 2007

Diario Freddo - Dimanche 26 mai1985

Oiseaux

Je me souviens du pigeon blessé que le voisin avait tué sous nos yeux d'enfants.
Il l'avait pris dans ses mains comme pour le soigner, le caresser, le réconforter.
Nous pensions que ces mains d'adulte allaient tout réparer. Et lui, il lui a soudain tordu le cou, d'un geste vif et inattendu. Il a immédiatement lancé la tête arrachée au loin dans le jardin. Il ne restait que le corps ensanglanté. Tous les enfants ont pleuré : ils se sentaient leurrés, trompés. Ils étaient scandalisés par ce geste.

Je me souviens du canari qui s'était envolé dans la maison, sortant du poêle à charbon. Nous l'avons recueilli. Mais il ne chantait pas. Nous avons emprunté le canari de mon oncle pour qu'il lui apprenne à chanter. Le notre pondit un oeuf.

Diario Freddo - Mercredi 22 mai 1985

"En Afrique, chaque vieillard qui meurt est une bibliothèque qui brûle." Hampate Bâ

vendredi 11 mai 2007

Diario Freddo - Lundi 13 mai 1985

Désir

Mois de mai
Où je vois fleurir
Sous ma fenêtre
Les cerisiers japonais

Mois des fleurs
Celui de la sève
Qui monte....

Diario Freddo - Vendredi 10 mai 1985

Avec LO, nous avons commencé la rédaction d'un scénario, à partir d'un fait divers.
Un vietnamien qui s'est envoyé plus de 300 françaises. Vengeance pour la patrie!
Mais qui finalement s'est fait assassiné par sa petite amie.

LO voudrais que je demande ce qu'il pense de notre premier brouillon à un psychanalyste que je connais.

Diario Freddo - Dimanche 5 mai 1985

Vert:

Jeunesse
Inexpérience
Jalousie
Espoir
Végétation naturelle
Liberté de passage
Patriotisme irlandais
Ecologie
etc.

Diario Freddo - Vendredi 3 mai 1985

Cette histoire se passe au temps où ma soeur était péripatéticienne.
Elle travaillait pour un certain Harry je-ne-sais-quoi, un vrai salopard.
Il faisait croire que c'était une école. L'académie qu'il l'appelait, le menteur.
Il était peut-être crétois.
C'était à Athènes, au quatrième siècle avant Jésus-Christ.

Diario Freddo - Mercredi 1er mai 1985

Ephéméride :

1. Liste groupant les divers événements qui se sont produits le même jour de l'année à différentes époques. Par exemple, l'éphéméride du 5 mars.
Du grec épi = pendant et èméra = jour

2. Calendrier dont on détache chaque jour une feuille.

lundi 30 avril 2007

Diario Freddo - Mardi 30 avril 1985

Tonio Adrénaline m'a envoyé quelques poèmes de son cru.

1.
Dans l'éternel exil des désirs crépusculaires,
Une musique seule convient pour meubler le décor
Et tromper le souverain désespoir des corps,
Ami, le tango est cette douleur nécessaire.


2.
La musique décida dans ses hésitations rythmées
D'arpéger mon malheur sur le mode mineur,
Égrenant ma vie en longues gammes mélancoliques.
J'assistais impuissant à cette sarabande,
Croyant jusqu'à la dernière mesure à un songe.
C'était hier et je n'ai pas dormi.

3.
Adieu, c'en est assez,
Puisqu'il faut ici-bas toujours tout reconstruire,
Je m'en irai ailleurs,
Chercher tout ce qu'ici,
Je ne peux que détruire.

Je m'en irai au hasard des chemins
Arpenter, calme et décidé,
Dans la tiédeur du matin,
Les sentiers de l'éternité.

Je m'en irai ailleurs,
Cueillant ici la fleur et là le fruit
Qui auront l'inédite saveur
Des couleurs autrefois interdites.

J'irai m'égarer sur ces routes de nulle part,
Espérant découvrir dans un pays perdu,
Le sentier oublié, la piste abandonnée,
Qui rejoindra tous ceux qui ont bu aux sources du Léthé.

Diario Freddo - Lundi 29 avril 1985

Femme de rêve et de papier

Femme faufilée
Femme décousue
Doutes d'enfant
Encore

Une histoire inventée de toute pièce
et qui te fait souffrir.
Laisse tomber tes scrupules.
Ce n'est pas toi qui dois regretter quoi que ce soit.
Ce n'est pas à toi de t'excuser.

lundi 23 avril 2007

Nouveau roman à lire 2007

« Est-ce que la vie est un jeu ? Si elle l’est, qui en fixe les règles ? Dieu et le Bouddha n’ont pas l’air de s’entendre là-dessus. Le premier nous dit qu’on a qu’une vie sur cette terre, après quoi on monte au paradis ou on descend en enfer, selon l’état de nos péchés. Le second nous enseigne qu’on ne monte ni ne descend nulle part : on tourne. C’est ce que m’a appris l’Oncle Minh – encore lui !

Il dit que dans le bouddhisme, le péché n’existe pas, seulement l’ignorance, ce qui explique pourquoi on a plusieurs vies : on tourne et à chaque tour – à chaque vie -, on a une chance de s’améliorer. Et on tournera autant de fois, on aura autant de vies qu’il faudra pour sortir de cette ignorance et atteindre le but ultime de tout bouddhiste : l’Eveil. Bien sûr, je ne l’ai pas laissé s’en tirer aussi facilement.

- Ca veut dire quoi, oncle Minh ?

- Ca veut dire qu’on est conscient, ma petite Tuyêt.

- De quoi ?

- Des causes profondes de la souffrance.

- Et alors ?

- Et alors on peut la neutraliser et atteindre la sérénité et, de là, accéder à la Joie.

- A la joie ? Il faut plusieurs vie pour apprendre à devenir joyeux ?

- L’ignorant est aveugle et le monde est fait de leurres. Tel qui croit fuir la souffrance y fonce, victime de ses illusions. Nous lisons tous le même livre mais ne tournons pas les pages au même rythme.

Avec tout ça, je me demande bien pourquoi on vit ! Monter, descendre, tourner en rond, à quoi ça rime ? Même si j’étais loin de comprendre tout ce que disait Oncle Minh, il me sautait aux yeux que je courais moins de risque avec le Bouddha qu’avec Dieu. »

Extrait de Tuyêt-Nga Nguyên, Le journaliste français, collection Le grand miroir, éditions Luc Pire, 2007.

mardi 17 avril 2007

Diario Freddo - Jeudi 18 avril 1985

Rêveries à propos des erreurs et des malentendus de jeunesse.
Désir de se justifier.
Chimères et orgueil que tout cela.
Puisque le but n'est pas une réconciliation.

Aimer TvT : c'est aimer au présent et à l'actif.

Mes professeurs me conseillent d'apprendre à lire l'allemand.
La mère de Lo m'encourage aussi. Puisque je lis déjà le néerlandais, lire l'allemand (sans pour autant savoir le parler) est un but tout à fait à ma portée, m'assure-t-elle. Et puis Wittgenstein est nettement plus facile à lire que Kant ou Nitezsche. Elle sait de quoi elle parle, elle a écrit son mémoire de licence en germanique sur Nietzsche.
Ah... la vie est trop courte pour apprendre l'allemand...

Ma copine de classe, Kalinka :
"Jeune fille en perdition, puisses-tu trouver ta voie."

Diario Freddo - Mercredi 17 avril 1985

La rencontre insolite d’un bouton de chemise et d’un mégot de cigarette sous la table d’un gébécuique.

Nous sommes assis l’un en face de l’autre. Nous avons fini de manger. Il ne dit rien, moi non plus. Il ne me regarde pas. Il pense, les yeux fixés sur un point sans importance, dans la rue qu’il voit à travers la fenêtre. Je me laisse aller au même genre de rêverie. Mon regard rencontre sous la table voisine un bouton, une cigarette à moitié fumée. Cigarette….

Sur son paquet de cigarette, j’avais écrit quelques mots doux : dans cette ambiance de fête, on ne s’entendait plus. A verso d’une enveloppe d’allumettes, il avait répondu d’un équivoque : « Don’t forget I am thirty ». Son âge m’importait peu, je ne voulais que lui. L’intérêt que je lui portais ne le dérangeait pas. Je lui plaisais, évidemment, mais j’avais seize ans. Il hésitait encore à se rapprocher de moi. Sans doute par crainte d’essuyer un refus catégorique. Après tout, nous n’avions bavardé jusqu’alors qu’à l’abri de la plaisanterie.

Le lendemain, il me parlait de sa vie, de ses amours perdus, d’un mariage qui avait échoué un mois juste avant le jour des noces. Il racontait ses nuits alcoolisées, ses vacances au canada et ses succès professionnels. Et puis encore la vie et ses mauvaises surprises. Il disait combien il était las de cette comédie que les hommes doivent jouer aux femmes pour les séduire. « Les femmes, il ne faut jamais leur dire qu’on veut coucher avec elles, sinon elles s’enfuient.»

Et moi, j’étais restée là à écouter ses théories, à l’écouter parler de sa vie, à marcher à ses côtés et à le regarder. Il avait l’air hypnotisé par ses propres paroles. Il reprenait périodiquement la litanie de sa vie, comme si ma présence ne comptait pas, comme si j’existais de moins en moins. Et il commençait à m’agacer. Je n’appréciais pas du tout d’être réduite, morceau par morceau, à une paire d’oreilles. C’était à moi de trouver le mot de passe, la clé qui le délivrerait de son discours.

J’ai saisi l’occasion : « Et si c’était une femme qui te séduisait ? »

- « Oh ! Ce serait tellement, tellement ….plus … cool … ». Il s’était arrêté de marché et m’avait regardée avec un regard étonné qui disait « Serait-ce possible ? »

Il a lu dans mon regard quelque chose de furieux, une rage adolescente. Il a eu l’air de comprendre quelque chose un moment. Je ne saurais dire quoi, mais je sais qu’il se trompait.

- « Petite fée » dit-il en me caressant la joue.

Etait-il prêt à m’embrasser ou à éclater de rire ? A cet instant je me rendis compte que j’avais peut-être finalement réussi à éveiller son désir.

Nous nous promenions, moi et l’homme que je désirais, seuls, dans les bois. Son regard n’était plus celui d’un petit garçon à sa compagne de jeu ni celui d’un frère à sa petite sœur. C’était pour la première fois celui d’un homme à une femme. Et comme toutes les femmes, j’ai eu un moment l’envie de m’enfuir. N’avais-je pas déjà atteint mon but, selon ses théories ?

Je suis restée. Je voulais poursuivre la promenade : « On marche ? » - « Oui », dit-il, en me prenant par les épaules. « J’attendais ce moment, pourtant je n’osais pas y croire. Je ne voulais pas expliquer nos rencontres fréquentes, et puis… »

Pour le faire taire je l’ai embrassé. Je n’en pouvais plus de ses vains discours.

- «Ecoute, je ne l’ai jamais fait. Je veux que ce soit toi le premier. C’est la seule explication qui compte. Compris ?»

Il a semblé embarrassé ou ému. Je me demande maintenant ce qui pouvait bien se passer dans sa tête. Mais là, sur le moment, ça m’était complètement égal. Et s’il avait imaginé ce qui se passait dans la mienne, m’aurait-il soulevée dans ses bras comme une jeune mariée ? M’aurait-il emportée comme le héros d’un film qui ravit la belle héroïne qui vient de lui avouer en pleurant un amour passionné et sans borne ?

Je n’avais nullement l’intention d me donner à lui. Je voulais le prendre. Je ne m’abandonnais pas à lui. Je ne lui cédais pas, Je ne lui offrais rien. Car ce n’est pas un cadeau ce dont on se débarrasse. Ce que je voulais de lui, c’était une initiation. Et de quoi me rendre la mort indifférente. Je pensais souvent « Mourir enfant, c’est comme aller en Egypte et ne pas voir les pyramides ! » L’idée de cette mort m’était insupportable.

Alors, j’ai joué le jeu. J’ai fait la jeune fille ravie. Je l’ai laissé m’emporter en étouffant à moitié un rire de surprise. « Mais, tu veux dire ... Ici ? » - « Mais, pourquoi pas ? Je t’en prie, dans la nature, c’est si beau ! » dit-il. – « Mais je ne peux pas…. » soupirai-je.

J’ai renversé la tête et j’ai vu la cime des grands pins, le vent qui faisait se balancer leurs branches. J’entendis les bruits de la forêt. C’était magnifique.

Il m’a déposée au milieu des fougères. Il a commencé par m’embrasser et me caresser. Il m’a débarrassée de mon vêtement doucement, pièce par pièce. Et nous n’avons plus parlé qu’avec nos yeux, nos sourires et nos rires. Et puis nous avons laissé parler le désir.

J’ai crié, c’est vrai. Je voudrais fabuler, parler de larmes et du bonheur de vivre. Dire que je jouissais, pour la première fois et dès la première fois. Parler du grand frisson bleu. Mais ce ne serait que des mensonges romantiques. Ecrire : « Le plaisir s’imposait à moi avec une force qui faisait trembler tout mon corps », comme dans un roman à l’eau de rose. Le sentiment qui dominait était tout simplement l’étonnement. Un étonnement d’enfant. Celui d’une rencontre avec soi, celui du premier geste, du premier pas, du premier mot articulé. Le plaisir n’était pas absent, mais je ne m’envolai pas au septième ciel. Je ne m’oubliai pas du tout. Je ne partageai rien. J’étais au contraire très présente, très consciente de la forêt. Je me sentais m’élargir, grandir, devenir aussi immense que la terre, aussi puissante que le vent. Des années plus tard, mon expérience de l’orgasme serait celle du bouillonnement des rapides, la chute d’un large torrent en cascade gigantesques. Une autre fois, celle de la déflagration brusque d’une bombe incendiaire.

Je ne sais pas et je ne saurai jamais ce qu’il a vécu. J’ignore encore quelles images peuvent donner une idée du plaisir d’un homme. Je n’ai pas osé lui demander. Je trouvais difficile de choisir des mots qui auraient sonné juste. J’étais troublée et je me taisais. Il a paré le premier. Il a prononcé quelques mots avec une voix d’emprunt : qu’il était temps de rentrer, si ça allait, si je n’avais pas faim ou soif. Je répondais par des signes de tête. Je souriais chaque fois que nos regards se croisaient.

Il avait été très doux. Parfait. Il avait pourtant l’air de s’excuser. Finalement, il a retrouvé sa voix habituelle, sur le chemin du retour et il m’a demandé : « Petite fée, comment est-ce possible ? Comment pourrais-tu m’aimer ? Tu sais bien que dans trois jours je dois retourner en Amérique. Et qui sait pour combien d’années ? » Je le savais et cela faisait un mois que, le poursuivant, je ne pensais qu’à cela : je décomptais les jours. – « Trois jours. Trois jours d’amour, c’est mieux qu’une éternité d’ennui. Trois jours entiers, c’est très bien. », lui ai-je répondu.

Il est parti. Il m’a téléphoné plusieurs fois d’Amérique. Un jour, il a appelé durant mon absence. Ma mère lui a répondu que ce n’était plus la peine, que j’étais avec un garçon de mon âge, maintenant. Il n’a plus jamais donné signe de vie.

Sous la table, le mégot, le bouton viennent d’être balayés par un vendeur. Je continue de promener mon regard au hasard. Sur la table, une souche. Au verso sont écrit quelques mots de bienvenue et de remerciement. Un mot m’accroche : il ressemble au nom de l’homme qui rêvasse en face de moi.

Et si je plie le K pour évoquer un H ? Je lui mets le bout de papier sous les yeux. Il a pris l’air de quelqu’un qui se réveille. Il a lu. Il a compris. Il a esquissé un rire gêné et détourné les yeux. Ila réagit. Il me regarde et sourit.

Lou Schibronsky ( Septembre 1984 - Avril 1985)

lundi 16 avril 2007

Ecrivain du jour : Pierre Deproges

"S’il est vrai que l’humour est la politesse du désespoir, s’il est vrai que le rire, sacrilège blasphématoire que les bigots de toutes les chapelles taxent de vulgarité et de mauvais goût, s’il est vrai que ce rire-là peut parfois désacraliser la bêtise, exorciser les chagrins véritables et fustiger les angoisses mortelles, alors oui, on peut rire de tout, on doit rire de tout. De la guerre, de la misère et de la mort. Au reste, est-ce qu’elle se gêne, elle, la mort, pour se rire de nous ? Est-ce qu’elle ne pratique pas l’humour noir, elle, la mort ? Regardons s’agiter ces malheureux dans les usines, regardons gigoter ces hommes puissants boursouflés de leur importance, qui vivent à cent à l’heure. Ils se battent, ils courent, ils caracolent derrière leur vie, et tout d’un coup ça s’arrête, sans plus de raison que ça n’avait commencé, et le militant de base, le pompeux P.D.G., la princesse d’opérette, l’enfant qui jouait à la marelle dans les caniveaux de Beyrouth, toi aussi à qui je pense et qui a cru en Dieu jusqu’au bout de ton cancer, tous, tous nous sommes fauchés un jour par le croche-pied rigolard de la mort imbécile, et les droits de l’homme s’effacent devant les droits de l’asticot. "
Pierre Desproges

Le coin du coach : "Lisez des romans !"

Nos émotions et nos besoins.

Qu’est–ce qui motive l’être humain ? L’intérêt égoïste ? Mais non, pas tout le temps ! Nos besoins sont bien plus complexes que cela. Nous avons beaucoup d’autres réponses émotionnelles. Quand vous voulez toucher quelqu’un, vous vous concentrez sur quoi ? Sur ses émotions. Ce sont les émotions, le moteur de notre action. Nous éprouvons des émotions quand nos besoins fondamentaux, ou bien ceux des personnes auxquelles nous tenons, ne sont pas satisfaits ou respectés.

Qu’est-ce qui fait vraiment une différence dans la qualité de la vie de quelqu’un?

Selon le life coach américain Tony Robbins, on peut retenir six besoins fondamentaux de tout être humain.

Ces besoins sont les suivants :

1 - le besoin de certitude : savoir à quoi s’en tenir, avoir des points de repères, se sentir en sécurité, en terrain connu, se sentir chez soi, avoir un certain contrôle sur sa vie et son environnement, etc.

2 - le besoin d’incertitude : être surpris de temps en temps, avoir un peu de variété dans sa vie, couper la monotonie du quotidien, être stimulé par son environnement, garder sa curiosité en éveil.

3 – le besoin de signifier quelque chose : partir à l’aventure, prendre des risques, avoir un impact sur les autres. Cela peut se faire d’une manière positive (être reconnu, être respecté, être écouté, etc.), aussi bien que d’une manière négative, (par la violence, la vitesse, la recherche du danger). Si je vous terrorise, je signifie beaucoup pour vous !

4 – le besoin de connection ou d’amour : avoir un cercle d’intimes, avoir des amis , être connu dans son environnement, être salué, avoir un rôle social, un réseau.

Ces quatre premiers besoins sont des besoins personnels, ensuite viennent des besoins plutôt spirituels :

5 – le besoin de croissance : se développer, apprendre, comprendre, grandir.

6 - le besoin d’apporter sa contribution au monde : exercer sa capacité d’aller au-delà de soi-même, d’être relié à quelque chose de plus grand que soi et d’intemporel.

(Ceci se réalise par exemple par des victoires, des exploits, des œuvres, des découvertes en tout genre.)

A votre avis, quand la plupart des gens commencent-ils à vivre réellement ?

Quand ils sont confrontés à la mort, à la finitude de notre séjour sur terre.

L’être humain est capable d’au moins 6000 émotions différentes. Combien pouvez vous en nommer ? Quatre, six, douze ?

Essayez d’en repérer et d’en nommer quelques unes, parmi celles que vous allez éprouver durant la semaine qui vient. Ce ne sera pas un exercice facile, je vous préviens.

Vous avez besoin d’aide ? Lisez des romans. C’est ainsi que nous apprenons à reconnaître les situations et à nommer et décrire les émotions humaines.

dimanche 15 avril 2007

Diario Freddo - Lundi 15 avril 1985

Pour en finir avec Wittgenstein

On a souvent rapproché la méthode « thérapeutique » du Wittgenstein des Philosophical Investigations de l’enseignement d’un maître Zen. Lire Wittgenstein, c’est commencer par renoncer à recevoir un quelconque enseignement, du moins sous la forme d’une doctrine de laquelle se réclamer. C’est aussi renoncer à attendre des explications et se contenter des descriptions d’usage de mots et des tableaux synoptiques d’où l’illumination doit jaillir. C’est ainsi prendre le risque de l’attendre en vain, cette illumination : le risque que le texte finalement ne nous dise rien.

Les grands problèmes de la philosophie traditionnelle et les tentatives pour leur apporter des solutions sont comme cette « troisième patte du poulet » à laquelle nous ne pouvons nous empêcher de conférer une existence. Ils sont des tentations et des désirs qu’il nous faut éteindre, mais auxquels, selon Wittgenstein, il nous faut aussi tirer notre chapeau, par égard pour ce vers quoi, en gesticulant sur place, l’idéaliste, le solipsiste ou le réaliste essayent vainement de faire mouvement.

Le contraste est surprenant pour celui qui se rapporte au texte de Wittgenstein après avoir lu certains interprètes, entre le grand maître génial qu’ils dépeignent – et promettent - et l’auteur ascétique « qui boude systématiquement son plaisir (et celui du lecteur) en matière de théorie », comme l’écrit Jacques Bouveresse dans La rime et la raison. Il est un maître déroutant qui suscite chez son élève le désarroi, même si c’est dans un but précis. Le lecteur novice peut ne pas dépasser ce stade de confusion (puzzlement, en anglais) et se demander à propos des commentateurs où ils vont chercher tout ça. Ne disent-ils pas eux-mêmes que les Investigations philosophiques sont le genre de texte qui peut se prêter à touts sortes d’interprétations délirantes à l’abri desquelles il est difficile de se maintenir. La situations des interprètes est très précaire parce qu’étant eux-mêmes philosophes, ils sont toujours sujets aux tentations théorétiques qui les conduiraient, s’ils y succombent à tirer une doctrine d’un texte qui se veut neutre – à peu près comme me magicien tire un lapin d’un chapeau.

Pour autant qu’il entreprenne une lecture wittgensteinienne des Investigations, l’interprète se faisant ainsi élève, est par rapport à notre lecteur novice un disciple aguerri qui serait déjà venu à bout de ses premiers koans, ces énigmes donnée à l’élève par le maître Zen pour qu’il y fixe son attention pendant la méditation. Il aurait déjà connu l’une ou l’autre forme d’illumination et viendrait dans ses «écrits faire partager aux novices son enthousiasme.

Qu’en est-il de ceux qui furent à proprement parler les élèves de Wittgenstein, pendant sa courte carrière à Cambridge ? Ce n’est pas parce qu’on a subi la cure wittgensteinienne que l’on devient thérapeute ni a fortiori un philosophe thérapeute de l’envergure de Wittgenstein.

Je vois deux possibilités extrêmes. Si le traitement s’est avéré efficace, l’étudiant atteint de philosophie se trouve libéré de toute tentation théorique (celle-ci a été réduite au silence) et dans une indifférence totale par rapport aux grands problèmes traditionnels, il s’en va étudier la médecine, le droit, ou quelque chose d’utile à la société.

Si le cancer philosophique a été découvert trop tard, et que malgré les différentes neutralisations wittgensteinienne, l’élève reste insatisfait, on le verra finalement se libérer non pas de son cancer mais de son thérapeute.

Il serait intéressant de voir les cas intermédiaires dans la réalité : ceux qui se sont dits disciples de Wittgenstein, bien que celui-ci n’ait jamais prétendu faire école. N’ont-ils pas fini par amender ou rejeter du moins sur certains points le discours du maître ? Autrement dit, n’ont-ils pas fini par ménager un espace pour leur propre discours philosophique, perpétrant ainsi un meurtre symbolique du père ? Je ne sais pas dans quelle mesure Wittgenstein ne s’exposait pas lui-même aux coups lorsqu’il exhortait à penser par soi-même. L’élève ne doit-il pas nécessairement tuer le maître ?

On peut concevoir des doutes sur l’efficacité du traitement wittgensteinien. Rencontrons nous un seul représentant du premier destin, la guérison totale ? Peut-on réellement se guérir de la philosophie ? Si l’on sait que Wittgenstein écrivait surtout pour apaiser ses propres tourments, on peut aussi se demander s’il a seulement réussit à se guérir lui-même, ou bien s’il n’a pas contribué, en élaborant des techniques thérapeutiques à entretenir et à nourrir le cancer philosophique. En définitive, le deuxième destin extrême envisagé, n’est il pas le plus wittgensteinien ? Il y était question de meurtre. Le Tractatus nous montre un exemple de suicide philosophique. Alors que son but est de réduire au silence tout verbiage métaphysique, l’auteur du Tractatus se permet d’écrire ce qu’on n’a pas manqué de décrire comme le chant du cygne de la métaphysique.

Comment réussit-il ce tour de force ? L’exposé se termine par un aphorisme qui a pour effet de biffer tout ce qui a été dit précédemment. Si vous l’avez bien compris, vous voyez que tout ce qui précède n’est que non-sens. Ce n’était qu’une tentative pour dire ce qui ne peut qu’être montré. Et cependant que cette entreprise n’a pas été totalement vaine puisqu’elle est l’échelle qui nous permet d’échapper à l’abîme philosophique, tandis que les théories et les écrits sur lesquels nous avions pris appuis du pied y sombrent.

Lou Schibronsky

Diario Freddo - Dimanche 14 avril 1985

Citation du jour:

"L'intériorité, l'intimité avec soi, pour une femme ne peut s'établir, ou se rétablir, que grâce au rapport mère-fille, fille-mère, qu'elle jouerait elle-même. Elle-même avec elle-même avant toute procréation. Devenant ainsi capable de se respecter dans son enfance et dans sa fonction créatrice maternelle. Ce geste est l'un des plus difficiles dans notre culture. Selon nos traditions, fidèles depuis des siècles à un Dieu-père engendrant un Dieu-fils à travers une Vierge-mère, le maternel féminin sert de médiation pour la génération d'un fils. Cette fonction, divine certes, n'établit pas une généalogie du divin entre femmes et notamment entre mère et fille."

Luce Irigaray,
Ethique de la différence sexuelle, Minuit, 1984.

Diario freddo - Samedi 13 avril 1985

L'anorexie peut aussi prendre des formes intellectuelles.
Elle ne me saisit pas seulement devant l'assiette, mais aussi à la table de travail.
Quand je vois tous mes livres et que je voudrais qu'ils ne contiennent tous que des images.
Quand je trouve que la bibliothèque est tellement plus belle, bien rangée.
Au moment où j'écris, les bouquins sont éparpillés sur la table et sur l'appui de fenêtre, à portée de la main.
Le fichier des citations règle leur valse lente.

MIND - BODY Pourquoi ce problème?

Dualisme:
l'esprit est quelque chose de non matériel ( non corporel)
L'âme comprend l'esprit, partie pensante, l'esprit est une faculté de l'âme.
A me et esprit peuvent survivre à la mort du corps.
Elles peuvent se réincarner dans un autre corps (métansaumatose).

Que le corps humain soit doté d'une ( et une seule?) âme (et donc d'un esprit) est inexplicable. (Le miracle)

Matérialisme:
Il n'y a que le corps palpable (par d'autres corps).
Le cerveau secrète la pensée comme le foie sa bile.
La pensée est un influx électrique dans les neurones.
C'est par ce que nous ne connaissons pas le fonctionnement du cerveau humain que nous nous sommes jusqu'ici contentés d'une description "animiste" de l'homme.

Spiritualisme:
Le corps n'existe pas, c'est une illusion! Seule la pensée existe. Ma pensée.

Monisme neutre:
Il n'y a qu'une seule réalité, ni matérialiste ni spiritualiste.
La réalité n'est ni mentale ni corporelle ou physique.
Ces prédicats sont distincts mais réfèrent à quelque chose de plus fondamental: un corps vécu.
Un organisme biologique avec ses comportements conscients, intentionnels.

Le dualisme semble être l'idée de l'homme de la rue, pourquoi?
D'où vient cette image de nous-mêmes?
D'où vient cette superstition de la causalité?

Lire: Gilbert Ryle, The concept of Mind
et Jacques Bouveresse, Le mythe de l'intériorité.

Contribution d'un lecteur : sa pensée du jour

Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou, perdre d'un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir ;

Si tu peux être amant sans être fou d'amour,
Si tu peux être fort sans cesser d'être tendre
Et, te sentant haï sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;

Si tu peux supporter d'entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d'entendre mentir sur toi leur bouche folle,
Sans mentir toi-même d'un seul mot ;

Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frère
Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi ;

Si tu sais méditer, observer et connaître
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur ;
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n'être qu'un penseur ;

Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage
Sans être moral ni pédant ;

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d'un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,

Alors, les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire,

Tu seras un Homme, mon fils.



Rudyard Kipling

Diario Freddo - Vendredi 12 avril 1985

"Raindrops on my windshield,
Tears from heaven."

Tom Waits


Lecture :

La route Blue, Kenneth White



"Pour connaître le vrai bonheur,
il faut voyager dans un pays lointain,
et même sortir de soi."

R. W. Emerson

samedi 7 avril 2007

Diario Freddo - Lundi 1er avril 1985

Théralène

Comme les jours où je me réveille emmurée,
Je suis dans le mur,
Prisonnière de la mitoyenneté du rêve et de la réalité.

Le souvenir de mes rêves est plus vif
Que le flou de ma vie qui veille
Qui manque de densité.

Je n'ai plus qu'une vague notion du passé
je ne sais plus d'où je viens
Où j'ai laissé la tâche entamée
Je ne sais pas où je vais
Ni qui dit "Je".

Je pose des actes plus irréels que des fantasmes.
Les gens assis autour de moi ne sont que le contour de leur légèreté nuageuse.
S'ils ne se taisent pas,
Leurs discours ressemblent à une musique d'anges.

Je fais tout le contraire de ce que l'agenda m'ordonne
En se moquant de moi
De son rire édenté.


Lou Schibronsky.

samedi 31 mars 2007

Diario Freddo - Jeudi 28 mars 1985

Voilà. Je suis brûlée.
Il sait.
Il est d'accord.
Il dit que le choix de l'auteur est bon.
Pour le sujet de mémoire,
il dit que c'est pas évident, qu'il faut préciser.
Surtout ne pas changer, mais circonscrire.
Lire toute l'oeuvre de L. W. pendant l'été.
Et ce n'est pas une mince affaire.
Et lire "Le mythe de l'intériorité" de Jacques Bouveresse.

Je peux commencer à faire des fiches bibliographiques.
Il faut lire les ouvrages de référence comme le Black et le Backer & Haker.

L'année prochaine, je devrais faire des exposés, écrire, mettre à l'épreuve les nouvelles idées.
C'est très important, dit-il.

Il me reste un petit détail à régler: les examens.

-Dis, tu ne vas pas mettre deux longues semaines à étudier un cours de 130 pages!
Ho, là, faut concentrer tout ça!
mettre au point un plan de travail et de lectures.


Film de ce soir : "Mortelle randonnée" avec M. Serrault et I. Adjani.

Dimanche 31 mars : "Never Cry Wolf" de ?
et "Hammet" de Wim Wenders


Jeudi 4 avril : "Streamers" de Robert Altman.

mardi 20 mars 2007

Diario Freddo - Lundi 18 mars 1985

La réplique qui tue, dans un film français:

"Quand on vous voit, on vous aime.
Quand on vous aime, où est-ce qu'on vous voit?"

Diario Freddo - Samedi 16 mars 1985

Il neige encore!
Je ne me souviens pas qu'il ait jamais neigé si tard dans l'année.
Je ne veux plus de neige.
Je veux le printemps.
Mais il neige encore.

Le poids de tant de neige fait se ployer les branches des arbres.
Parfois elles se brisent.
Le tronc s'épluche comme une peau de banane.
L'arbre s'ouvre comme une fleur épanouie,
comme une tulipe qui aurait trop chaud.

Diario Freddo - Vendredi 15 mars 1985

J'ai parlé aux doctorants P. N. et C. B. de mon sujet de mémoire.
Ils disent que c'est une idée valable, qu'il faut contacter et avoir l'accord d'un professeur avant la fin de cette année, afin de pouvoir commencer de suite : la recherche bibliographique, les lectures.

B. me demande de lire pour lui en italien, et de lui en faire un petit résumé, l'ouvrage utile d'Umberto Eco, "Comment on écrit une thèse".
Et en plus c'est très amusant à lire, Eco est très spirituel et souvent ironique.

Soir
Club de Karaté : Kime Shotokan
Je passe ma ceinture verte.
Ouf, enfin, j'étais en forme, en force?
N.B. Le Sensei ne s'est il pas trompé de Ki Hon?

Diario Freddo - Jeudi 14 mars 1985

Journée typique d'une étudiante de première licence en philosophie:

Réveil vers 8:00 - 8:30 ?
P'tit-déj.

Lecture de "La quête inachevée" de Karl Popper
relecture des notes de cours
rangement des dossiers et du bureau

Bavardé avec maman
12:00 Lunch : préparé une salade de riz au thon mayonnaise.

13: 00 Préparation des cours : remarques sur les Principia de Leibniz

14:30 Bus : lis la quatrième méditation de Descartes.

15: 15 Cafétéria : Bonjour, Adrien.

15:30 Cours de philosophie des sciences sociales : sur Claude Levi-Strauss

17:00 Cours de textes modernes: Descartes et Leibniz
Très dense, le cours se prolonge jusqu'à 18:40

Retour en bus 19.00

20:00 Dîner en famille

Film à la TV : "Le salaire de la peur" de Clouzot, un classique.

Conversation au téléphone avec TvT.

24:00 Couché

jeudi 8 mars 2007

2007 - Commentaire d'un coach

"Le pessimiste se plaint du vent,
l'optimiste espere qu'il va changer,
le realiste ajuste ses voiles."

-- William Arthur Ward
Envoyé par Benoit Charlet

2007 Commentaire d'un lecteur

“We work in the dark – we do what we can – we give what we have.
Our doubt is our passion and our passion is our task.
The rest is the madness of art”

-Henry James, “The Middle Years”

mercredi 7 mars 2007

Diario Freddo - Samedi 9 mars 1985

Première réécriture de "La rencontre insolite..." où je relate la première expérience sexuelle de Christine H. ( d'après ce qu'elle m'en a dit). Ce n'est pas encore ça.
La structure est la même, le contenu a changé, mais il reste à aiguiser les flèches et les lames.

A propos de cette première fois, l'héroine déclare : "Ce n'est pas un cadeau, ce dont on se débarasse".

C'est difficile de ne pas verser dans le mièvre quand on parle des ébats amoureux d'une adolescente. Les mots justes, justes descriptifs, ne viennent pas. Censurés à la source?

Diario Freddo - Vendredi 8 Mars 1985

Terminé "Cent ans de solitude" de Gabriel Garcia Marquez.

Diario Freddo - Mercredi 6 mars 1985

Je,
sujet vivant qui
entend (ouit), qui
voit, qui
goûte, qui
sent, qui
touche, et qui
se réfléchit en Je
sujet vivant qui
entend, voit, goûte, sent, touche et se réfléchit en Je.

"Je" a-t-il un sens?
Je vivant doit-il tuer Je?
La vie a-t-elle un sens?
Vaut-elle la peine d'être vécue?

Acte le plus immoral,
Péché entre tous :
Je tuant Je
Absurde
Aussi absurde et doué de non-sens que les autres questions.

La vie a-t-elle un sens?
Un arbre, ça n'a pas de sens :
Ça vit, ça grandit,
Ça n'a de forme que celle de sa détermination naturelle
qui est de s'élever vers la lumière,
de grandir,
développer de feuilles, des fleurs, des fruits,
de perdre ses feuilles,
toujours grandir et bourgeonner encore.

Je de la connaissance,
je de l'éthique,
je de l'esthétique
je logique

théorie et pratique confondues
Je sujet vivant
Insistant.

Diario Freddo - Mardi 5 mars 1985

Une inspiratrice :

Annie Leclerc, Parole de femme.

Diario Freddo - Lundi 4 mars 1985

Croquettes vietnamiennes :

Ingrédients :

Galettes de riz 1/4 de cercle.
Cheveux d'anges
Carottes
Viande de porc ( rôti)
Oignon
Ail
Champignons séchés
Crevettes
Sauce de poisson (Nuoc Mam)

Pour la sauce:

Piments (Sambal)
eau salée,
vinaigre ou citron,
sucre ou miel,
sauce de poisson


Pour la présentation :

Feuilles de laitue.
Vermicelles de riz

Commentaire du coach

Un passage dans la biographie de Juliette Gréco, "Jujube", caractérise bien cette attitude entomologique dans l'observation des rapports humains que partage également notre Lou.

"Elle regardera se dégrader les sentiments, les vérités vraies, les fausses, sans un mot. Elle attendra la décomposition des rapports humains pour dire adieu. Sans remords et sans regrets. Les autres ne comprendront pas comment ce coeur a pu s'ouvrir sur une chambre rouge et chaude pleine de secrets brûlants, se refermer sur eux pour les préserver des atteintes de toutes sortes et soudainement, se rouvrir en deux, sur une lame luisante, propre. Coupante. Les laissant seuls et en silence. Dehors. Coeur refermé sur des blessures dont les cicatrices sont pour la plus grande part imperceptibles. Les autres saignent toujours."

Diario Freddo - Vendredi 1er Mars 1985

"Aultre ne veult estre" de Félicien Rops
Poème Ithyphallique (?)

dimanche 18 février 2007

Diario Freddo - Jeudi 21 février 1985

On confond souvent l'amour et l'angoisse.

J'ai essayé de me débarrasser de toute mon angoisse.
Maintenant, quoiqu'il fasse de ses jours, je ne me tracasse plus.
Il ne me reste plus pour lui que tendresse et compréhension.

Sa situation me semble assez intenable :
être en troisième candidature en médecine!
Comment réussir ses examens ?
Peut-être faut-il que nos examens se déroulent séparément,
pour que nous réussissions nos cours séparément.
Mais sans se séparer.


Mes sentiments pour lui ont changé.
Mon amour est plus conscient de lui-même et de ses limites.
Je sais qu'il y a toute une partie de moi qui ne trouve pas à se réaliser dans cette relation,
mais ça ne veut pas dire que s'en est la fin pour autant.

En dehors de notre relation vit autre chose : le philosophique, le littéraire...
Je peux en être capable en relation avec d'autres gens qui me motivent.
Tandis que toi, tu me pousses à me dépasser dans d'autres domaines.

Il reste une place pour toi, TvT.
Une belle place.
Heureusement.

Diario Freddo - Mercredi 20 février 1985

Soirée avec les philosophes :
des gens bien divertissants.
"The big chill" à notre façon.

Diario Freddo - Lundi 18 février 1985

Je me suis réveillée de l'angoisse et de la jalousie :
faire le vide autour de moi,
autour de lui,
ne nous rapprochera pas plus.
Inutile de faire le vide autour de soi, funeste même.

Il y a là deux individus distincts - intègres - dont chaque rencontre est une joie.
Non pas un seul individu qui subirait la plupart du temps une séparation absurde et douloureuse.
Pour qui chaque rencontre ne serait qu'une justice, la fin d'une mise à l'écart injustifiée.
Nous ne sommes pas un "nous" coupé, nous sommes deux "tu" en relation, en dialogue.


Lecture :
J'ai commencé "Cent ans de solitude" de Gabriel Garcia Marquez.

mercredi 14 février 2007

Diario Freddo - Vendredi 15 février 1985

Perles du dictionnaire :

la syzigie: Position de la lune ( et par extension d'une autre planète) en conjonction ou en opposition avec le Soleil (nouvelle lune et pleine lune).

Paresthésie: trouble de la sensibilité se traduisant par la perception de sensations anormales.
Hyperesthésie: sensibilité exagérée, pathologique.

La nouaison : transformation de l'ovaire de la fleur en fruit.


J'ai écrit un nouveau texte poétique en français incorrect : "Nouaisons populaires".

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Nouaisons populaires

Il y avait cinq à six personnes qu'on leur avait montré le livre à Jean. L'un deux, un grand peu causant, s'en était accaparé. il se prenait pour un docteur ès littérature et il voulait le garder à lui tout seul pour comparer ensemble ceux des poèmes qui lui plairaient d'avantage. En définitif, on lui a dit: "Pour qui que tu te prends?".

Nous deux mon frère, on l'a envoyé au diable vert. C'est vrai quoi, il faut s'entraider mutuellement. surtout que jean il écrit excessivement bien, pareil qu'un écrivain. On lui a dit : "Si j'étais que toi, je ferais un livre. Surtout que du point de vue pécunier, ça pourrait être intéressant. Mais enfin, un éditeur, c'est quant même pas facile à se procurer, y parait."

Au docteur, il faut pas lui en vouloir. Il faut le pardonner parce qu'il a autre chose à penser. mais il croit qu'il sait le français mieux que quiconque, et il n'arrête pas de nous rabattre les oreilles avec ses idées de corrections. Cela m'insupporte.

Jean n'est pas sans ignorer le bon français, comme on lit sur le journal. Et du point de vue travail, il dit qu'il faut prendre ses poèmes tel que. Moi, je trouve même qu'il s'active de trop autour de sa plume, jusque tard dans la nuit. C'est pour cela qu'il jouit d'une mauvaise santé quoiqu'il est jeune. une fois il l'a échappée belle de tomber dans les pommes. Il n'a pas pris le temps de manger, il n'a pu s'empêcher que de continuer d'écrire parce qu'il dit toujours: "Je préfère écrire que le reste".

Selon mon avis, pour ne pas qu'il souffre à nouveau, rapport à sa santé, il doit solutionner la question soit en allant promener de temps à autre dans la rue passagère (mais au jour d'aujourd'hui, c'est un peu trop pollué), soit en partant en Espagne en vacances vu que ses parents ont tout de même une fortune conséquente. Même s'il leur dit souvent: "Je ne veux pas vivre à votre dépens!". Cela leur éviterait la peine de le voir aller de mal en pire. Je suis sûre qu'ils ne seront pas fâchés après lui, surtout que pour le moment, il n'a rien d'autre à s'occuper. C'est l'occasion à profiter d'aller voir du pays. et aussitôt son retour, il risque d'être mieux en forme pour son travail.

Entre les deux alternatives, je l'ai convaincu de ce qu'avec celle-ci, il a davantage de chances de s'en rappeler longtemps. Outre de cela, il ne s'est toujours pas avéré faux que les voyages inspirent les poètes. Il m'a observé que ce pays est infecté de bandits qui volent les voitures, qu'on pourrait avoir des avatars en routes et qu'il appréhende de partir. Aussi étrange que cela paraisse, il préfère rester ici que partir.

Je dois dire, venant de lui, cela m'a stupéfaite. peut-être que je m'y suis pal prise pour lui présenter la question. Quand même que ce serait vrai qu'il y a des voleurs, ça n'empêche pas les gens d'aller à la mer. Dans la vie, on risque toujours, même en sortant de chez soi, comme par exemple de se faire une entorse.

Comme il était dix heures sonnantes, je me suis en allée: je devais aller au coiffeur. mais je l'ai invité chez nous à manger. il viendra tantôt, ce midi, enfin, vers midi- midi et demie que je lui ai dit. Il est sympathique Jean. Il a dit qu'il s'était très amusé en notre compagnie.

Lou Schibronsky et le Dictionnaire Orthographique Larousse 1938.

Diario Freddo Jeudi 14 Février 1985

Hello my dear LO,

Je ne sais pas du tout quand tu entendras mes mots, avec tes foutues vacances que j'envie. je ne sais pas quand tu seras là.
J'ai tant de choses à te dire, hélas, nous ne nous voyons plus.
Comment veux-tu que je continue sans toi?

Je vis ces semaines en orbite de la planète Saturne.
J'ai craqué.
J'en avais marre de tourner autour du Soleil.
Je ne m'étais jamais sentie aussi humiliée.
Je ne comprenais pas pourquoi je le laissais continuer à me piétiner.
Comment avons-nous pu en arriver là?

J'ai donc opéré ma révolution copernicienne à l'envers.
Je lui ai proposé de se quitter...
et...
il n'a pas voulu...
il a dit que tout allait changer,
qu'il allait changer,
qu'il ne râlerait plus.
Maintenant, c'est lui qui vient me chercher à la sortie des cours.
Le soleil s'est remis à tourner autour de la terre.

Trop près l'un de l'autre,
il m'a fait subir tout ce qu'il peut se faire souffrir lui-même.
Nous avons repris les bonnes distances -
Pour un temps.
Attraction:
Ne pas dépasser les limites du choc.

Nouveau pacte
Jusqu'à la fin des premières sessions d'examen.
Un amour d'étudiants dure ce que durent les études d'université.

Une Saint Valentin sans artifices commerciaux.

Cinéma: "La femme publique"
enter nous: des larmes de surprise et d'émotion.

Mais qu'est-ce qui fait courir Lou Schibronsky?


J'ai frôlé le désespoir,
je me sens mieux.
Cette syzigie aurait pu me coûter la vie!

Diario Freddo - Mercredi 13 février 1985

Mon texte poétique sur la naissance du point de vue du nouveau né,
intitulé: "Quelle est la différence entre une cigogne?" sera publié.

Elle m'a vu rougir, intimidée !


Après dix ans de mariage, mon oncle et ma tante préparent la venue d'un bébé.
Ils n'y croyaient presque plus. C'est un petit miracle de la nature.

J'en parlais avec Sophie, une autre étudiante en philosophie.
Lou: "Quand voudrais-tu un enfant?"
- Sophie : "Idéalement, quand je pourrais lui montrer qu'il y a moyen d'être heureux, ici."
Lou: "Mais c'est trop demander! quand il y aura moyen de vivre!"


***

Quelle est la différence entre une cigogne?


Depuis combien de temps suis-je là? Je ne m'en souviens pas. je suis venu me loger ici et j'y suis si bien que je ne voudrais plus m'en aller. Il fait noir. mais ça ne me dérange pas: il a toujours fait noir. Ce qui me plaît, c'est qu'il fait bien chaud. J'entends souvent cette musique de piano qui plaît aux battements de mon coeur. Ah! je voudrais ne jamais l'oublier. Et je me plais à croire que c'est pour moi que l'on joue.

Je ne me sens pas seul, ici. Il y a cette voix, ces voix. Elles parlent une langue que je ne comprends pas, mais les intonations sont tendres et joyeuses. Parfois elles chantent. Même si je ne peux pas répondre, je ne me sens pas tout à fait étranger à cela, à tous ce qui se passe dehors. Est-ce qu'elles se rendent compte que j'existe? Je l'espère.

On pourrait dire que je suis paresseux, mais c'est faux. Simplement, je n'ai presque rien à faire. Je passe mon temps dans mon bain, à rêvasser et à me prélasser. Je laisse entrer l'eau dans mon nez, mes oreilles, ma bouche. une eau douce, sucrée. C'est un tel plaisir! Et je m'étire, me tourne et me retourne... Le temps n'a pas de limites, ou il s'est arrêté, ou il n'a pas d'importance chez moi.

Parfois, je n'ai même pas besoin de me remuer, je me sens balancer de gauche à droite et de haut en bas. Je me laisse mener en bateau. C'est cela, je dois être quelque part sur la mer, emporté au gré des vagues. J'ai vraiment cessé de désirer être ailleurs.

Les bruits et les voix ont recommencé. Cette fois, j'entends distinctement deux voix: celle qui m'est familière et que je préfère et une autre, chaude et grave. Les voix se mêlent, s'entrelacent en en dialogue ponctué de quelques rires brefs: elles se répondent amoureusement. Cela va durer des heures, puis je vais les entendre respirer plus fort et gémir dans un langage que je comprends mieux. Je crois que je suis tombé amoureux de ces voix, de tous les bruits et de cette musique de piano. C'est aussi cela qui me retient ici, qui me séduit et m'a fait oublier tout ce que j'ai connu avant. Cela doit sans doute s'appeler le bonheur.

Je me suis couché sur le côté, j'ai ramené mes genoux sur mon coeur et mes bras sur ma poitrine, ma tête un peu inclinée. Ce calme est propice à ma méditation. Pourtant, aujourd'hui, j'ai un pressentiment bizarre. Je ne me sens pas comme d'habitude. Aurais-je encore grossi? Tiens! je viens d'entendre un bruit qui m'est inconnu: une explosion, un éclat. La voix s'exclame, articule sans discontinuer des propos impatients. Pourvu qu'il ne leur arrive rien à mes voix chéries et à ma musique de piano! Oh! mais qu'est-ce qui se passe chez moi? Mon bain me fuit, il s'écoule, il s'échappe....

Enfin, la voix en a fini de s'exclamer, elle me parle calmement. On dirait qu'elle prépare une fête, une surprise. Moi, je me sens inquiet, oppressé, je ne comprends pas. Il se passe bien quelque chose? Ce séjour si agréable devient des plus détestables. J'ai l'impression qu'un deuxième moi s'applique à la paroi de mon corps pour m'étouffer, me faire éclater. Je me sens de plus en plus indésirable. Il faut donc que je m'en aille. Je ne choisis pas.
Je me sens irrémédiablement poussé. Ma tête s'engage dans un couloir mollement tapissé. Comme je me sens à l'étroit! Il ne fait pas bon rester ici; il faut continuer.

Une force rythmée continue de me pousser hors de ma demeure, loin du berceau de mon bonheur passé. Hier encore! J'entends des voix inconnues qui semblent m'encourager, tandis que je me dirige lentement vers un espace rosé...

Cette lumière, ce froid! Où suis-je tombé? Je crie. Est-ce donc ma voix que je viens d'entendre? Je ne la savais pas aussi laide! Je sens l'air caresser ma peau, pénétrer par mes narines et en ressortir plus chaud. J'ai respiré pour la première fois. Une voix joyeuse a dit: "Madame, c'est une fille." Ensuite, on m'a déposé entre deux seins très doux et j'ai reconnu la voix que je préfère qui pleurait de joie: "Ma petite puce, ma chérie, mon bébé..."
Ah! C'était donc toi....

samedi 10 février 2007

Diario Freddo - Lundi 11 février 1985.

TvT
Je veux te quitter, mais je n'en ai pas le courage.
Je suis lâche.
J'ai peur de te perdre à jamais parce que je t'adore.
Je t'aime à en devenir folle.
Mais je ne peux plus me respecter moi-même, si je te laisse ainsi me fouler aux pieds.
Allègrement.
Et te rire de moi.
Fais une fois pour moi ce que je fais pour toi.
Alors je recommencerai peut-être à te croire.
Je me sens mourir.
Mais ne serait-ce que par respect pour moi-même.
Par principe.
Il me faut trouver un nouvel amant.
Si tu pouvais être celui-là.